Création d’entreprise : entreprise individuelle ou société, IR ou IS ?
Lorsqu’un restaurateur veut créer sa structure, se pose la question du choix entre entreprise individuelle ou société. Mais au-delà de la forme juridique, c’est aussi le choix de la forme fiscale, impôt sur les sociétés ou impôt sur les revenus, qui doit être tranché. La décision est importante, surtout en présence d’endettement.
Commentaires par Rémi Gourrin, associé Fimeco Walter France.
Plusieurs formes juridiques sont possibles, et de ce choix découle le type d’imposition.
Rappel express des règles
Si l’entrepreneur opte pour l’entreprise individuelle, son revenu est constitué de l’intégralité de son bénéfice fiscal. Il sera imposé à titre personnel sur ce revenu et paiera également des charges sociales sur celui-ci.
S’il opte pour une forme sociétaire, type SARL :
- sa société, personne morale, pourra sur option être imposée à l’IS (impôt sur les sociétés) sur ses bénéfices ;
- lui-même, personne physique, sera imposé à l’IR (impôt sur le revenu) sur sa rémunération de gérant, sur laquelle il paiera des charges sociales.
S’il opte pour l’EIRL – entreprise individuelle à responsabilité limitée – de plein droit, son revenu sera fiscalisé à l’impôt sur les revenus comme un entrepreneur individuel classique avec pour différence la possibilité d’opter pour l’impôt sur les sociétés.
Le coût d’un restaurant est élevé
Actuellement, un restaurant (on ne parle pas ici des restaurants étoilés) est valorisé autour de 3,5 fois l’EBE (excédent brut d’exploitation, c’est-à-dire le bénéfice avant imputation des amortissements), ou bien sur la base d’un pourcentage du chiffre d’affaires, généralement autour de 80 %. Ce pourcentage varie ostensiblement selon qu’il s’agit de Paris ou de la province, du lieu d’implantation, etc.
Les montants en jeu entraînent quasiment systématiquement la souscription d’un emprunt pour une partie significative de l’achat.
Quand on emprunte, mieux vaut opter pour l’IS
Un primo-accédant, ou un entrepreneur déjà en exercice qui doit contracter un emprunt significatif pour lancer son activité ou racheter un fonds de commerce, recourt le plus souvent à une forme sociétaire.
Pourquoi ?
La première raison est que l’IS est souvent moins coûteux que l’IR pendant la période de remboursement de la dette. En effet, dans le cas d’une forme sociétaire, c’est la société qui emprunte. Dans le cadre d’une structure soumise à l’impôt sur les sociétés, les bénéfices mobilisés pour assurer l’autofinancement nécessaire de l’emprunt seront certes soumis à l’IS mais non compris dans la base des charges sociales.
A l’inverse, dans le cas d’une entreprise individuelle, les bénéfices, bien que mobilisés pour rembourser l’endettement, seront soumis non seulement au barème progressif de l’impôt pour les personnes physiques mais aussi compris dans la base des charges sociales personnelles de l’exploitant.

Fonds de commerces, éléments soumis ou non aux amortissements déductibles fiscalement
Par ailleurs, le prix comprend les éléments corporels et incorporels (marque…), et la part de la valorisation du matériel par rapport à la valorisation globale est souvent minime. Or, seul le matériel bénéficie d’un amortissement fiscalement déductible.
La partie incorporelle du fonds de commerce peut être amortie, mais elle n’est pas déductible fiscalement.
Acquisitions autofinancées, IR ou IS ?
Dans le cas d’une acquisition autofinancée, nous pourrions penser que la fiscalité importe peu. En réalité, nous devons retenir que l’endettement dans cette configuration ne se fait pas au profit de la même personne. Dans le cadre d’un autofinancement, c’est le chef d’entreprise (personne physique) qui joue le rôle de l’organisme financier. Il souhaitera donc récupérer ses fonds probablement avant une vente programmée. Dans ce cas, se pose la question du net disponible maximum mobilisable pour y concourir. A première vue, la fiscalité IS semble plus intéressante. En effet, seul l’impôt sur les sociétés grèvera les revenus destinés au remboursement de la dette envers le chef d’entreprise. Cette dette sera le plus souvent matérialisée dans une société par un apport en compte courant d’associé, plus rarement en capital compte tenu de l’indisponibilité des fonds.
Néanmoins, il convient de prendre en considération l’incidence d’une vente future sans réinvestissement concomitant, cas rencontré en fin de carrière notamment. Dans ce cas, prenons exemple d’un fonds de commerce autofinancé de 300 000 euros. Même si la plus-value liée à la cession est potentiellement exonérée, 300 000 euros seront disponibles. Dans le cadre d’une entreprise individuelle, ces 300 000 euros pourront être captés par le chef d’entreprise sans formalités ni surcoût. Dans le cadre d’une société IS, une distribution de dividende écrêtée d’un maximum de 30% de fiscalité et d’éventuelles charges sociales diminuera sensiblement le net disponible à terme.
En synthèse, l’IR n’est pas à négliger dans le cadre d’une opération autofinancée sur la fin de carrière d’un restaurateur qui, au surplus, ferait une plus-value significative au moment de la cession.
Nous voyons donc que les options fiscales doivent être faites en fonctions de multiples paramètres et que l’attrait de l’IS est loin d’être une évidence et peut parfois s’avérer anti-performant.
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